Chapitre 2:

Je m’étais levé assez tôt se matin-là. Je ne voulais pas être en retard pour mon tout premier jour de cours dans cette prestigieuse école qu’était Samezuka !

Après avoir fait ma toilette dans la salle de bain commune aux troisièmes années, je descendis avec Sousuke déjeuner dans le réfectoire.

Le choix de nourriture était aussi impressionnant que la veille. Je me servis largement et allait m’asseoir avec Sousuke, Momotarou et Nitori.

J’étais plutôt content de m’être fait des amis aussi facilement. De plus, ils ressemblaient beaucoup à… Bon, il faudrait peut-être que j’arrête avec « eux ». Mon seul et unique objectif est de battre Haru, après, c’est fini. Nous ne sommes plus le même groupe qu’on était avant. J’ai changé, ils ont sûrement changé, eux aussi. Désormais, ma nouvelle vie est ici, à Samezuka, et mes nouveaux coéquipiers feront partie de l’élite, comme moi. Je ne veux plus simplement nager en amateur, comme je faisais avec « eux » au collège. Maintenant, c’est du sérieux.

La journée commença avec quelques cours ennuyeux, tel que les maths et la géographie. Ensuite vint l’après-midi, avec mon premier cours de natation. J’avais hâte de revoir Seijuro. Je me demandais quel genre d’entraîneur il était… Etait-il aussi sévère et encourageant que Sasabe-coach, mon ancien coach au collège ?

Je me changeais dans les vestiaires et me rendis dans à la piscine. Cette fois-là, la salle était remplie de lycéen torse nu. Il y en avait pour tous les goûts. Gou aurait été aux anges.

Je remarquais alors un groupe de troisièmes et deuxièmes années. Je m’avançais vers eux. Je reconnus alors Seijuro expliquant les règles du jour.

Seijuro : Aujourd’hui, c’est assez simple. Je vais d’abord faire passer tout le monde un par un pour une série de longueur à nages variées. Ensuite, nous procèderons à des exercices d’apnée pour mesurer votre niveau. Ensuite, après avoir recueilli toutes ses données, je pourrais vous classer en groupes équilibrés. Allez, on commence !

Je vis défiler un certain nombre de nageurs. Ils semblaient tous performants, mais aucun d’entre eux ne pouvaient m’égaler au crawl.

Seijuro : Matsuoka Rin !

C’était à mon tour. Je me levais du banc et m’approchais.

Seijuro : Bon, c’est assez simple, tu vas commencer par un aller-retour chronométré dans la nage que tu souhaites. Le crawl j’imagine ? Bien, ensuite tu fais un quatre-nages en deux allers-retours, dans l’ordre du relais. Soit, un aller dos, le retour en brasse, le second allé en pap’ et le deuxième retour en crawl. Après, on passe directement à l’apnée. Bien, tu es prêt ? Start !

Je sautais du plongeoir sur lequel j’étais en un plongeon qui me sembla parfait. Je fis un aller-retour crawl, comme demandé. Puis je fis les deux allers-retours en quatre-nages. L’apnée aussi.

Je remontais sur le rebord et allait voir le coach.

Seijuro : Incroyable, Rin ! Tu maintiens le record partout ! Tu es pour le moment le meilleur ! Et ta nage est splendide ! Tu as correctement appliqué mon conseil, je suis fier de toi ! C’est fini pour toi, aujourd’hui. J’évalue les autres et je te dirais avec qui tu es demain. Au suivant !

J’allais me doucher et repartit pour mes autres cours.

Le lendemain arriva très rapidement. J’avais hâte de savoir avec qui j’allais être pour les entraînements.

Je déjeunais avec mes nouveaux amis. Eux aussi avaient eu d’excellents résultats à leur test d’hier. Notamment Sousuke, qui m’égalisait presque en papillon.

La journée passa vite, elle aussi. On en était déjà au cours de natation de l’après-midi.

Seijuro : Bien ! J’ai fait les statistiques de vos résultats d’hier. Grâce à eux, j’ai pu en déduire des groupes de quatre nageurs équilibrés prêts pour nager le relais. Bien, alors d’abord il y a Watari avec Tanaka, et…………………………..  et pour finir, le dernier groupe sera composé de Nitori, Momotarou, Sousuke, avec à leur tête, Rin !

Je me tournais vers mes amis et nouveaux coéquipiers. Alors, ça allait être nous, la meilleure équipe ? J’en frissonnais d’excitation.

Rin : Les gars, je compte sur vous !

Le premier entraînement fut un peu brouillon, ponctué de rires et très détendu. Mais ce n’était que le début. Je ressentais chez mes camarades un potentiel à exploiter. C’était agréable de pouvoir enfin travailler avec des gens à son niveau !

A la fin de l’entraînement, Seijuro me retint un peu :

Seijuro : Rin, attends, s’il te plaît, j’aimerais te parler.

Rin : Oui ?

Seijuro : Toi et tes camarades comptez faire du relais ?

Rin : Nous n’en avons pas vraiment parlé, mais je pense que c’est une possibilité. Pourquoi ?

Seijuro : J’ai entendu dire que tu étais arrivé premier au relais à un tournoi inter-collège, c’est vrai n’est ce pas ?

J’hochai la tête.

Seijuro : Eh bien, je me suis permis de faire quelques petites recherches sur d’éventuelles équipes rivales que vous pourriez rencontrer. J’ai été assez étonné.

Rin : Ah oui ?

Seijuro : En effet, un certain lycée, Iwatobi il me semble…, vient de ré-ouvrir un club de natation. Alors, je suis allé un peu fouiner et j’ai réussi à obtenir quelques-uns des chronos de leur équipe de relais…

Rin : Et ?

Seijuro : Ils ont de très bons temps. Mais ce n’est pas tout… Trois des membres de leur club faisaient partie de ton équipe de relais du collège.

Faisaient partie de mon équipe au collège ?! Mais il ne peut s’agir que de…

Seijuro : D’ailleurs, j’ai aussi pu connaître leurs chronos individuels en crawl… L’un d’entre eux est arrivé à soixante-dix secondes sur un cent mètre, exactement comme toi !

J’en restais muet. Ce ne pouvait quand même pas être lui…

Rin : Comment s’appelle-t-il ?

Seijuro : Ah, ce gars-là ? Euh, eh bien, il me semble qu’il s’appelle… Haku, ou un truc du genre…

Haru, je t’avais retrouvé.

Je rentrais aux dortoirs pensif et songeur. Haru m’égalait toujours. Cela m’ébranla quelque peu. Et si je n’arrivais pas à le battre ? Devrais-je vivre avec cette seconde défaire cuisante toute ma vie ? Je savais que si je ne le battais pas, je ne pourrais pas devenir champion olympique. C’était assez problématique… Il allait falloir que je m’entraîne plus encore… Mais, et si lui aussi connaissait mes temps et qu’il décide à son tour de travailler plus dur ? Ce n’était pas son genre de vouloir être le meilleur, mais s’il avait changé d’avis par rapport à l’eau ? Et s’il voulait devenir  champion olympique, lui aussi ?

Sousuke dû remarquer mon air vague car il me proposa de venir étudier à la bibliothèque avec lui et les autres.

Je ne pus rien faire d’autre qu’accepter.

Nitori : Rin-sempai, tu n’as vraiment pas l’air dans ton assiette… On peut peut-être t’aider ? Tu ne comprends pas ton exercice de maths, c’est ça ?

Je relevai la tête surpris. Ils me regardaient tous, une lueur d’inquiétude dans le regard.

C’est vrai que je ne devais pas avoir l’air très joyeux. Je décidais alors de leur confier mes doutes.

Nitori : Eh ? Tu dis qu’un autre nageur détient le même record que toi ? C’est alors vraiment possible… Effrayant…

Momotarou : Et en plus, ce serait ton ami d’enfance et également ton plus grand rival… Mais tu es sûr que c’est bien lui, au moins ?

Rin : Oui, c’est certain, c’est le coach qui me l’a dit tout à l’heure, en sortant de la piscine. Il n’y a pas de doute possible là-dessus.

Sousuke : Il est vrai qu’apprendre que son rival ait aussi progressé est toujours démoralisant. Mais je crois en toi, Rin. Je pense que tu pourras le battre, cette fois-là ! Et puis, même si tu n’y parviens pas, nous leur mettrons la raclée au relais, ça je peux te l’assurer !

Je souris, un peu soulagé. C’est vrai, je pouvais vraiment compter sur eux… Haru, tu ne t’en sortiras pas aussi facilement ! Je gagnerai !

Cela faisait plusieurs semaines que nous nous entraînions très dur. Nous avions tous progressé, même moi, qui avais été un peu refroidi à l’idée de devoir battre Haru qui était aussi fort que moi.

Une compétition était prévue pour les jours à venir. Rien de bien important, juste un petit tournoi inter-lycée des lycées du coin. Et Samezuka et Iwatobi étaient bien sûr tous les deux sur la liste des inscrits. J’en avais quelques frissons, j’allais enfin pouvoir les revoir ! Makoto, Nagisa et… Haru. J’étais un peu contradictoire, je sais, mais lui aussi, j’avais hâte de le revoir, et pas que pour me battre. Avant d’être mon rival, Haru avait été mon ami et j’avoue qu’il me manquait un peu, parfois…

Demain, c’était uniquement réservé aux premières années, nous passerions après-demain.

Le lendemain arriva vite. Le surlendemain aussi.

Notre petit groupe se retrouva devant le portail, comme il était prévu. L’air était toujours aussi chaud. Pour une fois, nous étions tous habillé en civils. Cela faisait plutôt du bien, le tissu de qualité des uniformes étant assez chaud. En-dessous nous portions déjà nos maillots de bains. Le stress était palpable. Nous étions tous tendus. Moi je l’étais à ce qui me semblait l’extrême. L’idée de revoir Haru me donnait des frissons, autant d’excitation que d’appréhension.

Aujourd’hui, nous passions tous les quatre pour la course de relais. Ensuite, seul moi et Sousuke avions décidé de passer en solo. Lui faisait le papillon, moi le crawl. Course pendant laquelle je risquais de me mesurer à Haru.

Nous prîmes le bus pour nous rendre à la salle de compétition. Ce n’était pas très grand, c’était juste pour les compèt’ du coin. Mais bon sang, ce que cela me ravivait de puissants souvenirs !

Nous arrivions en pleine matinée. Nous étions pour l’instant les seuls de Samezuka. Les autres ne viendraient que l’après-midi, pour leurs propres courses. Nous, nous avions préféré venir plus tôt pour pouvoir observer éventuellement nos futurs adversaires. Et peut-être revoir mes anciens amis un peu plus longtemps que le temps d’une course. Cela, je ne l’avais pas dit clairement à haute voix, mais les autres semblaient avoir capté. Je leur en étais reconnaissant.

L’endroit n’était pas spécialement bondé. Mais je savais que le peuple arriverait quand leur gladiateur préféré, Samezuka, entrerait dans l’arène. Cette école était très connue, mine de rien.

Mis à part le manque de public évident, l’endroit était assez sympa. C’était une piscine découverte de cinquante mètres. Les gradins s’étalaient de chaque côté de cinquante mètres. Les vestiaires se trouvaient sous les gradins et leur accès n’était réservé qu’aux nageurs.  

Nous nous installâmes dans les gradins, aux places du bas.

Le temps passait, petit à petit, et toujours pas de Haru en vue. Les équipes défilaient les unes après les autres. J’étais déjà un peu rassuré : aucune ne semblait nous égaler.

Il allait bientôt être midi. Je commençais à avoir faim malgré la boule de stress qui me tiraillait le ventre. Je me levais.

Rin : Je vais chercher à bouffer au snack du coin. Qui veut quoi ?

Après avoir pris les commandes des mes amis, je me dirigeais vers le snack le plus proche de la piscine.

Alors que j’étais trop concentré sur le rythme de mes pas, je me pris quelqu’un de plein fouet.

Rin : Ouch ! Désolé, je ne regardais pas devant moi, vous allez bien ?

Je bassais les yeux. J’avais renversé un garçon d’environ mon âge par terre. Il avait les cheveux bleu-violet et ses yeux étaient encadrés d’une paire de lunettes rouges. Je l’aidais à se relever.

Gars : Ah, oui, merci. Désolé, moi non plus, je ne regardais pas devant moi ! Je suis un peu stressé car je passe une compétition de natation cet après-midi et c’est ma toute première !

Rin : Oh ? Tu es un nageur toi aussi ?

Gars : Oui ! Je m’appelle Rei ! Je suis nageur de papillon, mais aujourd’hui je participe au relais avec des amis !

Rin : Vraiment ? C’est marrant parce que moi aussi je participe au relais de cet aprèm ! Ah, et enchanté, je suis Rin.

Rei : Enchanté ! Bon, et bien, dans ce cas-là, à tout à l’heure et bon courage !

Rin : Oui, toi aussi.

Nous avions mangé et nous étions fin prêts.

Le public et Samezuka semblaient être arrivés au même moment. Quelle… coïncidence. En tout les cas, les gradins étaient désormais remplis.

Ca allait être à nous. Nous trépignions tous d’impatience. Je n’avais toujours pas vu Haru. Ni Rei, d’ailleurs.

Présentateur : Bien ! Maintenant, c’est au tour des équipes de relais de deuxième et troisième années. En place !

Nous nous avançons alors vers le plongeoir que l’on nous avait attribué et nous mîmes en file indienne. D’abord, Momotarou, qui prenait le départ en dos, ensuite, Nitori, qui filait avec la brasse. S’ensuivait après Sousuke, en papillon, et enfin, moi, en crawl.

Présentateur : Bien, à vos marques…prêts… Partez !

Une série de magnifiques plongeons défila sous nos yeux.

Tout à coup, j’entendis une voix qui m’était étrangement familière :

………….. : Allez, Mako-chan !!!!!

Nagisa. Ca ne pouvait être que lui, j’en étais certain. Je regardai à droite et à gauche, mais l’excitation de la foule et les bonnets de bain portés par les nageurs m’empêchèrent de distinguer quoi que ce soit. Je reportais mon attention sur notre propre course.

Pour le moment, Momotarou était en tête et c’est tout ce qui devait m’importer.

Il revenait en force vers nous et BBIMMMMMM ! Il s’était pris le mur, comme à son habitude. Au moins s’était pour lui, un signe indiquant qu’il était en pleine concentration. Cela ne put que nous encourager à faire de notre mieux. Nitori, habitué à ces arrivées « à la Momotarou », s’élança alors. Une autre voix me parvint distinctement à l’oreille :

………… : Allez, Nagisa-kun !!

Cette voix aussi, je la connaissais, mais… d’où ? Je n’arrivais pas à m’en souvenir. Mais une chose était désormais sûre : l’école d’Iwatobi était dans la course.

Nitori parvenait à maintenir l’écart et même, il ne cessait de l’agrandir. Ce qu’il avait progressé depuis le début de l’année ! J’étais fier de lui.

Nitori toucha le mur. Sousuke s’envola en un plongeon sublime.

Mais, une autre voix retint mon attention :

…………. : Courage, Rei…

Une voix taciturne, posée, familière. SA voix. Haru était là.

Je regardais partout, dans l’espoir de le voir.

Et c’est alors que Sousuke revenait en force que mon regard croisa un éclat d’un bleu pur.

Sousuke toucha le mur.

Je plongeai.

Je ne réfléchissais plus. Mon instinct s’éveilla et je partis comme une flèche.

Je savais bien que ce que j’avais vu, c’était les yeux d’Haru qui me regardaient aussi, mais je n’y pensais plus. Seule comptait la course.

J’allongeais le mouvement de mes bras. J’inclinais le battement de mes jambes de manière à mieux me maintenir à la surface. Et une, deux, une, deux. Demi-tour en galipette. Poussée contre le mur et c’est repartit. Plus que cinquante mètres. Respire. Comme ça, c’est bien. Allez, une, deux, une, deux. Je touche le mur.

Je lève les yeux vers le panneau d’affichage : Premier : Samezuka.

On est les premiers ! On a gagné le relais !

Sousuke : Bien joué, Rin.

Sousuke m’aide à me sortir de l’eau. Nitori et Momotarou se jettent sur moi, heureux. C’était notre première compétition, et nous étions déjà une équipe de choc.

Rin : Bravo à vous les gars, vous avez été supers.

Je m’écarte légèrement d’eux et me détournais. Il fallait que je vois Haru. J’avais croisé son regard juste avant de plonger. Deux perles d’un bleu enivrant. J’en avais des frissons.

Je regardais autour de moi, mais je ne voyais personne qui pouvait ressembler à un Haru, un Nagisa ou un Makoto.

Déçu, je rejoignais mes coéquipiers vers la buvette qui venait d’ouvrir pour les courses de l’après-midi. Mais c’est alors que je senti un regard posé sur moi. Un regard bleu.

Je regardais à droite, à gauche, mais personne. Pourtant je savais qu’il était là et qu’il me regardait. J’abandonnais toute tentative de recherche et pris un verre de jus. Je me dirigeais ensuite un peu à l’écart, à l’ombre, derrière le bâtiment des gradins. Je m’assis sur un rebord en béton, bus quelques gorgées et respirais un bon coup. Je savais très bien qu’il allait me rejoindre. Ce n’était plus qu’une question de temps.

Haru avait toujours été comme ça. Il n’aimait pas spécialement la foule et n’aimait pas élever le son de sa voix pour parler. Il préférait les endroits calmes.

Je fermais les yeux.

…………. : Hoy.

Je rouvris les yeux et me relevai. Il était là, devant moi. L’éclat de ses prunelles était prenant. Il avait beaucoup grandi lui aussi, mais il restait toujours plus petit que moi. Ses muscles s’étaient beaucoup développés. Il avait la même coupe de cheveux que la dernière fois où je l’avais vu, sous le grand cerisier de la cour de l’école, juste avant que je ne parte. Il semblait toujours aussi calme et taciturne.

by: Emi